ROUDOUDOU E LA RIVOLUZIONE DEI BINARI
L'EPOPEA DELL''ERASMUS, UN CORSARO DI CARAVAGGIO !
Chronique de KRISTIAN FRÉDRIC
24 septembre 2024
Il restait une semaine en Italie. Une dernière, une ultime étreinte avec cette terre où l’on pourrait presque entendre les statues murmurer entre deux poses figées. Nous quittions Venise, la ville qui nous avait adopté comme des protagonistes d’un film d’auteur. La gare Santa Lucia était une symphonie de valises qui se traînaient et de soupirs impatients, tandis que notre train, tel un héros vieillissant, attendait, robuste, l’heure du départ.
Nous étions en route pour Pavie, où les coulisses du théâtre nous appelaient, où des rêves de collaborations opératiques prenaient forme, comme des plans séquences encore flous. La caméra imaginaire zoomait sur nos visages, marqués par l’excitation de l’inconnu. Roberta, elle, pensait déjà aux dialogues possibles pour notre future pièce, et moi, j'avais les yeux rivés sur les paysages qui se préparaient à défiler comme une pellicule d’un road movie italien. Pourtant, un détail nous échappait : au-dessus de nous, dans un ciel bleu trop parfait, planait une menace.
Roudoudou. Ce perroquet, cette boule de plumes jalouse, n’avait pas supporté l’idée d’être écarté de cette aventure. Et bien sûr, dans son arrogance toute volatile, il avait ourdi un plan. Le premier acte d’un complot.
Roudoudou, perché sur une branche non loin de la gare, fixait l'horizon avec intensité en lançant un cri furieux :
- « Non mi lasceranno qui ! Io sono il protagonista di questa storia ! Mi vedranno, eccome se mi vedranno ! »
(Ils ne me laisseront pas ici ! Je suis le protagoniste de cette histoire ! Ils vont voir, oh, ils vont voir !)
De là-haut, Roudoudou avait trouvé le centre nerveux de la ligne ferroviaire. Dans un geste de pure audace — et peut-être un peu de folie — il plongea en piqué vers une antenne de télécommunications. C’est là qu’il mena sa première attaque : piratage des signaux radio. Il gazouillait furieusement des ordres confus dans toutes les fréquences disponibles, créant un chaos d’instructions contradictoires.
Conducteur du train (au centre de contrôle) :
- « Signore, abbiamo un problema ! La linea dice di fermarsi, ma il segnale è verde ! »
(Monsieur, nous avons un problème ! La ligne dit de nous arrêter, mais le signal est au vert !)
Centre de contrôle :
- « Che diavolo sta succedendo ? Non vediamo nessun guasto sul Sistema ! »
(Mais qu'est-ce que c'est que ce bordel ? On ne voit aucune panne dans le système !)
Et tandis que les signaux de détresse fusaient, notre train continuait son avancée. Dans notre wagon, le paysage déroulait ses trésors : des plaines d’un vert velours, des vignes ondulantes sous le soleil, des maisons de pierre qui semblaient s’accrocher aux collines avec la détermination d’un acteur à un rôle de second plan. Les gares se succédaient comme des chapitres dans un roman de voyage, chacune marquée par des visages anonymes, des voyageurs au regard fuyant.
Mais sous cette façade de tranquillité, la révolte de Roudoudou prenait une tournure plus dramatique. Il avait, avec une dextérité qui ferait rougir n’importe quel espion, désactivé une série de commutateurs à distance. Résultat : une confusion totale des horaires. Notre train était sur la même voie qu’un autre, venant en sens inverse ! Une collision paraissait inévitable.
Roudoudou (au sommet d’un poteau électrique, triomphant) :
- « Finalmente ! Vedremo chi è il vero padrone del viaggio ! »
(Enfin ! Nous allons voir qui est le vrai maître du voyage !)
Mais, comme dans un film de Dino Risi, le drame tourna à la farce. Par une intervention divine — ou peut-être un dysfonctionnement bénin du système ferroviaire italien — les trains passèrent l’un à côté de l’autre, si proches que l’on aurait pu tendre la main pour saluer les passagers du train adverse. Roudoudou, qui s’attendait à une explosion digne d’un film catastrophe, s’égosilla de frustration.
Roudoudou :
- « Noooo ! Dove sono i fuochi d'artificio ? »(Noooon ! Où sont les feux d’artifice ?)
Et tandis que notre train continuait sa route, imperturbable, Roudoudou décida de passer au plan B : la déstabilisation morale. Par un vol plané élégant, il se posa sur le toit du wagon, son bec déjà en train de cogner contre le métal comme un tambour de guerre.
Roudoudou (tapotant) :
- « Rendetemi i miei umani o scatenerò l'inferno ! »(Rendez-moi mes humains ou je déclencherai l'enfer !)
À l’intérieur, les passagers se regardaient, incrédules, en entendant ces sons étranges. Peut-être était-ce le vent ? Un instant fellinien où tout le monde semblait accepter le surréalisme comme une norme.
Enfin, après cette longue bataille psychologique, notre train arriva en gare de Pavie. Les freins crissèrent, et dans un dernier sursaut, il s’immobilisa. Mais au lieu d’une arrivée triomphante, la scène qui nous attendait était presque apocalyptique. Les employés de la gare couraient dans tous les sens, des papiers volaient, et Roudoudou, furieux de n’avoir pu dérailler notre destin, se retrouva coincé dans une banderole publicitaire flottante, battant frénétiquement des ailes.
- Roudoudou (étouffé sous la banderole) : Maledetta Pavie !(Maudite Pavie !)
Mais malgré ses efforts et son sabotage raté, nous étions là, au milieu du chaos, riant devant cette arrivée grandiose et rocambolesque. Les passants, eux, n’y voyaient que des artistes venus d’un autre monde, et la gare résonnait déjà de l'écho de nos pas, prêts à écrire la prochaine scène de notre aventure théâtrale.
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