QUAND L’ART BRISE LE SILENCE DES LARMES
L'EPOPEA DELL''ERASMUS, UN CORSARO DI CARAVAGGIO !
Chronique de KRISTIAN FRÉDRIC
21 septembre 2024
Première escale dans le grand port de la Biennale d’Art contemporain ! En ce samedi ensoleillé, je me lance à l’abordage des pavillons dans les Giardini di Venezia. Une vraie expédition digne d’un marin intrépide. Il faut de l’endurance, de la curiosité, et surtout, de bonnes chaussures – celles qui vous rendent invincible face aux kilomètres de pavés vénitiens. J’en ai arpenté des pavillons, vu des créations qui feraient fondre les semelles de mes souliers. Mais en fin de journée, quand vos pieds sont ornés d’ampoules comme des médailles de guerre, vous savez que ça en valait la peine.
Oh, combien de récits marins pourrais-je partager de cette traversée artistique ! Des vagues d’émotions me submergeant, du rire aux larmes. Si l’on veut badiner tout en réfléchissant sur le monde et le pouvoir, cap sur le Pavillon suisse. L’artiste suisse-brésilien Guerrero do Divino Amor vous invite à une fête nationale où l’autoreprésentation est roi et le carnaval un royaume d’ironie, de liberté et de douce folie. Dans Super Superior Civilisations, c’est un monde capitaliste qui engloutit tout pour le recracher sous forme d’images, se dévorant lui-même dans un dernier éclat de rire. Un véritable coup de vent qui fait tanguer le bateau.
Le Pavillon Français, quant à lui, vous embarque pour une plongée abyssale avec Julien Creuset à la barre. On se retrouve dans un univers multi sensoriel digne des légendes marines, où les paysages sous-marins se dévoilent comme des trésors enfouis. Des images hypnotiques vous entraînent dans les profondeurs de l’océan Atlantique ou des Caraïbes, là où les sculptures-lianes de filets marins s’entrelacent avec des éléments organiques et des déchets, le tout indissociable des visions futuristes subaquatiques diffusées sur grand écran. C’est comme découvrir une sirène dans un vieux coffre rouillé.
Et puis, il y a l’escale au Pavillon britannique, Écouter la pluie toute la nuit de John Akomfrah. Ici, le marin que je suis se retrouve à scruter l’horizon des problèmes contemporains – mémoire, migration, injustice raciale, changement climatique – tout en se laissant bercer par le doux murmure de la pluie et des sons du monde. C’est un voyage poétique, un doux roulis qui invite à l’écoute.
Mais alors, la tempête émotionnelle m’a frappé de plein fouet au Pavillon Polonais. Là, le marin que je suis a perdu pied. L'exposition Répète après moi II du collectif ukrainien Open Group m’a cloué au sol, comme si une ancre géante m’empêchait de bouger. Dans une salle obscure, un grand écran, des pieds de micros qui forment une frontière entre les images et nous, pauvres spectateurs. Des réfugiés ukrainiens se présentent, reproduisent le son d’une arme ou d’un élément sonore gravé dans leur mémoire de guerre. Un karaoké de l’horreur, où les bruits du monde sont ceux de la destruction. Pas d’emphase, pas de pathos. Juste des êtres, tout âge confondu, recréant des sons face à vous. C’est opératique, c’est simple, c’est terrifiant. Et moi, marin aguerri, je suis resté là, pétrifié, tandis qu’un torrent de larmes, plus salé que l’océan lui-même, déferlait de mes yeux.
Des souvenirs d’autres tempêtes sont alors venues frapper à ma porte. Mon voyage à Sarajevo sous les tirs de snipers, les récits de luttes et de résistances des femmes torturées dans les geôles espagnoles. Chaque son me rappelait pourquoi je détestais tant les feux d’artifice dans les villes en paix. Parce que dans chaque explosion, il y a l’écho d’une guerre passée, d’une douleur inoubliable. Et dans chaque pavillon, un fragment de notre humanité qui survit malgré tout.
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